→ 1987, ANCHORAGE
« Bienvenue dans la famille Savannah Lullèbe-Danaé Wilworth. » dit-elle souriante, en tenant dans ses bras, la petite fée qui venait de les rejoindre. Elle était magnifique, enveloppée dans des draps de soie rose. Le nourrisson regardait avec attention les yeux brillants de celle qui était devenue maman. « C'est le plus beau jour de ma vie » s'exclama t-elle en caressant affectueusement la joue de sa petite fille. « Pour moi aussi » ajouta Andrew Wilworth qui s'était tenu jusqu'à lors, en retrait pour ne pas gâcher le moment de complicité entre les deux femmes de sa vie. Elle le fixa, les yeux rempli d'amour et de gratitude. « Excusez de vous dérangez » interrompit une infirmière qui venait de rentrer discrètement dans la chambre. « Je vous apporte de bonnes nouvelles. Elle est en parfaite santé, vous pourrez chez vous dans une semaine. » annonça t-elle en se retournant pour quitter la chambre d'hôpital; morbide et froide. « Tu entends ça ? C'est fantastique ! On va bientôt pouvoir commencer notre nouvelle vie. Juste tout les trois. » dit-il en déposant un baiser sur le front de sa femme. « C'est fantastique. » répondit-elle en fermant les yeux. « Qu'est ce tu as ? Tu n'as pas l'air contente. » remarqua t-il soucieux. « Bien sûr que je le suis. Elle est tout ce que j'ai toujours voulu. Elle est parfaite. Et elle est nous.... » dit-elle en essuyant des larmes mêlés de fatigue et de joie

→1987, ANCHORAGE, cinq jours plus tard
« Andrew, mon amour ... ». Elle était faible. Elle était pâle. Ses yeux chocolats semblaient s’éteindrent, se recouvrir lentement d'un voile sombre. « Je crois que je vais mourir » dit-elle sur un ton sincère. Elle se retourna vers lui, pour essuyer les fines larmes qui commençait à courir sur son visage. « Je ne te laisserais pas partir ... » réussit t-il par articuler avant d'éclater en sanglot. « Tu n'as le droit de me laisser tout seul » continua t-il « Tu n'es plus tout seul, Savannah est là, avec toi ! » dit-elle en esquissant un faible sourire « La mort est là, je la sens » ajouta-elle en fixant le plafond blanc « Ne déteste pas Savannah pour ça. Elle est ... vous êtes la plus belle qui me soit jamais arriver dans la vie, je ne regrette rien. Aime la, comme elle le mérite. Aime la comme tu m'aime. Aime la comme j'aurais dû l'aimer. C'est tout ce que je désire encore. Promet le moi.». « Promis » chuchota t-il malgré sa tristesse. Il se leva et prit Savannah dans ses bras pour les déposer dans ceux de sa mère. Elle la fixa comme pour incruster son visage dans sa mémoire. « Il y aura toujours une partie de moi en elle. Ne l'oublie jamais. »

→1987, ANCHORAGE, deux jours plus tard
« Hallo ? » s'exclama Andrew, après avoir coincé le téléphone entre son épaule et son oreille. « Bonjour, ici le Docteur Alchester, je souhaiterais parler à monsieur ... Wilworth. » s'exclama la voix à l'autre bout du fil. « C'est lui même » répondit-il. « Monsieur Wilworth, pouvez vous venir à l'hôpital dans la journée ? » demanda alors la voix grave du médecin. « Bien sûr, j'arrive tout de suite. ». C'était aujourd'hui que Madeleine était censée sortir de l'hôpital. Il sauta dans sa voiture, chargé comme un mulet à cause de toutes les affaires qu'il avait prise pour Savannah. Il passa les portes et salua d'un signe de tête tous les patients. Il entra dans la chambre de sa femme et trouva une armée de médecin en blouse blanche. Une infirmière berçait la petite Savannah dans ses bras. Madeleine Wilworth l'avait pressenti. Elle succomba en cette nuit du 10 février, à vingt trois heures et cinquante huit minutes exactement, d'une fièvre puerpérale : une maladie infectieuse, qui survient après un accouchement, surtout dans le cas où l'expulsion du placenta n'a pas été complète. Les médecins disaient que cette infection avait été causée par des bactéries qui avaient gagnés le péritoine et d'autres organes abdominaux. « Nous vous présentons toutes nos condoléances » s'exclama un médecin aux cheveux grisonnants. Le sang d'Andrew se glaça. Malgré la culpabilité et la tristesse qu'il ressentait en cet instant. Il trouva la force d'arracher des bras de l'infirmière, la petite Lùbelle. « Vous auriez dû la sauver » lâcha t-il froidement avant de quitter la pièce.

→1993, ANCHORAGE
Assise sur une chaise, la petite Lubèlle regardait flotter ses céréales qui s'étaient imbibées du lait et étaient maintenant toutes molles. Elle plongea sa cuillère dans son bol et la portant à sa bouche. Son père sortit de la pièce et l'embrassa sur le front avant s'assoir à côté. « Dis papa, elle est où ma maman ? » demanda t-elle innocemment. Andrew n'aimait pas qu'elle lui pose ce genre de question, il était mal à l'aise. Ce n'était pas un homme très délicat mais pas au point de dire 'ta mère est morte en te mettant au monde'. Il ne voulait pas qu'elle se sente coupable de la perte de sa mère. « Elle est partie rejoindre les étoiles, chérie ! » se contenta de répondre Andrew. « Et quand est ce qu'elle revient ? Pourquoi on est pas allés avec elle ? » demanda t-elle encore, rongée par la curiosité enfantine. « Ma puce, ta maman ne reviendra pas, elle est dans un pays où le soleil brille, les oiseaux chantent et où tout est magnifique et on ne peux y accéder que tout seul. Alice est allée toute seule au pays des merveilles. » répondit-il en se levant pour débarrasser la table. « C'est mamie qui te garde aujourd'hui » annonça pour changer de sujet.

→1993, ANCHORAGE, quatre heure plus tard
Lùbelle était assise en tailleur sur le lit double de la chambre de son père. Elle essayait de déchiffrer le sens des lettres imprimées sur le papier. « Savannah viens manger ! » appela sa grand-mère. Elle ferma instantanément le livre qu'elle avait sur ses genoux et sauta du lit. Elle arriva dans la cuisine. « Pourquoi tu m'appelles Savannah ? » demanda la petite fille, fatiguée d'entendre sa grand-mère l’appeler par un prénom que le sien. « Parce que c'est comme ça que tu t'appelles, ma puce ! » répondit-elle en lui pinçant les joues. Lùbelle grimaça. Elle détestait quand elle lui faisait ça. Elle n'était pas un poupon. « Non, je m'appelle Lubèlle. » renchérit la petite fille. « Oui. Mais ce n'est pas ton premier prénom, mon ange. Ta mère t'a appelé Savannah Lubèlle-Danaé. » dit-elle. La petite fille écarquilla les yeux. Si c'était, son premier prénom, pourquoi son père l’appeler par son deuxième ? « Papa, n'aime pas Savannah ? C'est pour ça qu'il m'appelle autrement ? » demanda t-elle encore. « Ton père ne t'appelle pas Savannah car ta mère t'appelait comme ça et elle lui manque beaucoup alors, il préfère ne pas y penser. »

→2001, ANCHORAGE
« Comment se sont passés tes cours ? » demanda son père en claquant la porte derrière lui. « Bien et toi, ton boulot ? » demanda t-elle en examinant un photo. « Bien. » répondit-il aussitôt. « Qu'est ce que tu regardes ? » demanda t-il piqué par la curiosité. « Les vieux albums de famille. » répondit t-elle sur un ton neutre. « Maman était belle » s'exclama t-elle évasive. « Oui. Sur ce point tu lui ressemble beaucoup » répondit son père, une pointe de nostalgie dans la voix. « Dis ... tu n'as jamais pensé à la remplacer ? » demanda t-elle alors, en voyant que son père avait la parole facile. « Ta mère est irremplaçable ! » répondit-il en lui souriant. « C'est un interrogatoire ? » demanda t-il sur le ton de la plaisanterie « Pas du tout. C'est juste qu'à treize, je ne connais toujours pas le prénom de ma mère, ça craint un peu. » répondit-elle en ricanant. « Elle s’appelait Madeleine » lui avoua son père. « C'est beau ! » s'enthousiasma t-elle

→2006, ANCHORAGE
« Hey ! Ça vous dis qu'on aille faire un tour, histoire de fêter dignement la fin du lycée ? » demanda Sarah toute excitée. Lùbelle fit la moue mais finit par suivre sa bande. Elle n'allait certainement les laisser s'amuser sans elle. Sans trop savoir comment, elle se retrouva en marcher entre les allées de tombes au cimetière de la ville. « Je ne savais pas que tu avais de la famille ici Lul' » s'exclama Duncan qui s'était arrêté devant une tombe. « Parce que je n'en ai pas. » répondit-elle en lui lança un sourire hypocrite. « Alors c'est qui Madeleine Wilworth ?» demanda t-il en la regardant. Le visage de Lùbelle se décomposa. « C'est ma mère » babultia t-il en état de choc.

→2006, ANCHORAGE, 30 minutes plus tard
Lùbelle rentra chez elle claquant la porte. Des larmes coulaient abondamment le long de ses joues. Son père était confortablement assis sur le canapé, entrain de lire le journal. « TU COMPTAIS ME MENTIR ENCORE LONGTEMPS ? » hurla t-elle, on pouvait sentir dans sa voix tremblante un mélange de sentiment de trahison et de tristesse. « De quoi tu parles et qu'est ce qui te met dans cet état ? » demanda t-il en remarquant ses larmes. Elle fit un bond en arrière quand son essaya de les essuyait. « NE ME TOUCHES MÊME PAS ! J'AVAIS CONFIANCE EN TOI, JE TE DISAIS TOUT ET TOI TU ...» commença t-elle en faisant une pause pour essayer de ravaler sa colère. « Mais enfin, qu'est qu'il se passe ? » demanda t-il complétement perdu. « MAMAN EST M-O-R-T-E » lâcha t-elle furieuse « ALORS TU COMPTAIS ME LE CACHER ENCORE LONGTEMPS ?! » demanda t-elle avec son père en le fixant avec des yeux noirs. « Comment le sait tu ? » demanda t-il béat. « JE SUIS ALLÉE ME BALADER AU CIMETIÈRE » répondit-elle avec énervement. « J'avais l’intention de le dire ... »se défendit-il « QUOI ? TU VEUX DIRE QUE TU AURAIS FINI QUE MAMAN N’ÉTAIT PAS UNE MARCHANDE D'ART QUI VOYAGER DANS LE MONDE. J'AI ÉTÉ TROP NAIVE DE TE CROIRE ! J'AURAIS ME DOUTER QUE TU CA ÉTAIT FAUX ! » s'exclama t-elle ironique et vexée. « Je te l'ai pas dis, pour ne pas que tu t'en veuille » dit-il simplement en se pinçant l'arrête du nez. « Pourquoi je m'en voudrais ? » dit-elle alors qu'elle commençait à se calmer « Ta mère est morte en te mettant au monde Lùbelle. » avoua t-il « Je ne voulais pas que tu portes ce fardeau. Excuse moi.» s'expliqua t'il « Je ne voulais que tu sentes coupable » conclut-il. « Je te pardonne. Tu m'as toujours protégé et c'était ton rôle mais tu aurais dû avoir confiance en moi. Je suis beaucoup plus forte que tu ne le crois. Mais pour être honnête, je ne sais pas si je pourrais te pardonner le fait que m'est menti toute mon enfance. » exclama t-elle. « Je suis désolée, je vais avoir besoin de temps. Énormément de temps.» continua t-elle avant de quitter le domicile familial

→2006, ANCHORAGE, 45 minutes plus tard.
Ted Stevens Anchorage International Airport. « Bonjour. Le prochain vol décolle à quelle heure ? » demanda Lullèbe essoufflée, en posant ses papiers sur le comptoir. Une rousse d'environ trente ans, ses cheveux tirés en arrière lui donnait l'impression d'être secrétaire de milliardaire. « L'avion E136 décolle dans une heure trente-sept pour l'aéroport JFK à New York. Vol direct, pas d'escale. 436$ l'allée simple ». New York ? Elle lâcha un soupir de soupir de soulagement. Elle venait d'être acceptée à NYU. Elle tira du fond de sa poche une liasse de billet vert. Elle avait vidé son compte. Il lui en restera assez pour s'installer là bas.

→2006, NEW YORK Accoudée au comptoir d'un bar miteux. Lùbelle n'avait qu'une seule envie, partir en courant, mais elle restait là, sans bouger. Elle était coincée entre deux filles blondes à fausse poitrine et sur-maquillée. Too much. Un homme entra. Toutes les femmes le regardèrent avec des yeux pleins de désir. Lùbelle, lui accorda un rapide coup d'oeil désintéressé. Pour le peu qu'elle avait vu. Oui, il était beau et charismatique mais pas le genre d'homme que Lùbelle pouvait considérer. « Excusez moi ...» commença t'il d'une voix suave. Tous les regards étaient maintenant tournés vers eux. Elle détestait être le centre d'attention. « Je crois que vous pouvez m'aider ... » chuchota t-il à son oreille. La jeune femme frémit. « Je ne suis pas serveuse ...» s'exclama t-elle en se reculant, dans l'espoir qu'il la laisse tranquille. « Je ne veux pas de verre ! » ricana t-il. « Alors que voulez vous ? » demanda t-elle avec désinvolture. « Je veux toi Lùbelle ! » répondit-il le plus naturellement du monde. Comment connaissait-il son nom ? Effrayée, elle n'eut pas le courage de demander d'où il la connaissait. Elle quitta le bar en courant. Le lendemain, elle se trouvait dans son lit. Ce qui était censé être une relation d'une nuit, se transforma en quatre ans d'amour.

→2010, NEW YORK
Central Park. Lùbelle regardait avec amertume les amoureux qui s'embrassaient à l'ombre d'un chêne. Les gens qui se tenaient par la main lui faisait horreur. Elle avait envie de pleurer mais ses yeux étaient trop secs. Aucunes larmes ne pouvaient couler, pourtant, ce n'est pas l'envie qu'il lui manquait. Elle lui avait tout donné. Absolument tout. Elle ne c'était jamais confié autant à quelqu'un. « Je suis désolé » s'exclama t-il en surgissant tout a tout coup de nul part. « Non. Va t'en ! » s'écria t-elle après avoir sursauté. « Je ne veux plus te voir ! JAMAIS ! » s'exclama en commença à partir. Ezekiel la retint par le bras. « Pardonne moi ! Je t'aime tellement ... » dit-il les yeux humides. « Je sais ... Moi aussi » admit-elle en ravalant un sanglot. « Mais je crois que tu aimes les femmes en général bien plus que moi ... » continua t-elle alors qu'une fine larme coulait le long de sa joue. « J'ai eu tors de croire que tu étais prêt à changer pour moi. J'aimerais te pardonner mais te surprendre avec une autre femme m'a détruite. Donc .. Entre nous, c'est terminé ! » annonça t-elle sur un ton qui tachait d'être dur.

→2011, ANCHORAGE
Bientôt deux ans que je suis de retour à Anchorage. Je n'aurais jamais dû partir. Je m'en rend compte maintenant. Je n'ai pas pratiquement pas pensé à LUI. Je ne veux pas. Je l'aime toujours, tellement ... malgré tout ce qu'il m'a fait.