NOM : monroe. PRÉNOMS : dahlia, préfère d'avantage être appelée par son second prénom, asphodèl.. ÂGE : vingt-trois ans. DATE & LIEU DE NAISSANCE : vingt juin mille neuf cent quatre-vingt huit à anchorage. STATUT FINANCIER : relativement modeste. ORIENTATION SEXUELLE : hétérosexuelle. STATUT CIVIL : mère célibataire. MÉTIER : serveuse à mi-temps et étudiante en médecine. GROUPE : skinny love.

« Maman, pourquoi mes copains bah leurs parents y vivent tous les deux? »
Mon regard se baissa vers Devon. Le genre de questions que je redoutais, mais que je n'évitais pas. Malgré tout, je soupirai, arrêtai le gaz de la gazinière et pris mon fils dans mes bras. Je passai une main dans mes cheveux, tenant mon fils contre moi d'un bras. J'avais pris l'habitude, en six ans. Devon passa ses bras autour de mon cou, déjà attentif face à ma future explication proche. « Tu sais mon cœur, commençai-je, un peu hésitante et peureuse de faire une gaffe, de ne pas avoir les mots justes, il arrive parfois que les parents ne s'aiment plus assez pour vivre ensemble. » Il me regarda sans trop comprendre. Je me mis à mordiller ma lèvre inférieur, en quête de vocabulaire assez adapté pour que les explications soient claires à mon fils. « Maman et Papa ont été amoureux, avant. Mais parfois, il arrive que l'on ne tombe pas amoureux de la bonne personne au bon moment. C'est ce qui s'est passé avec eux. Quand ils s'en sont rendus compte, ils ont préféré se séparer. » Conclus-je en me déplaçant vers la table, et je le déposai sur une chaise avant de lui servir le repas. C'était.. Presque cela. J'étais tombée enceinte de lui lorsque j'avais seize ans. Darren, son père, a pas très bien digéré la nouvelle, et m'a carrément lâchée dans cette galère, et ma famille ne m'a pas été d'un grand renfort, m'aidant juste parce que j'étais une des leurs et non pas avec réelle conviction. Donc j'étais toute seule dans l'histoire. Comme si j'avais réussi à féconder le bébé toute seule. Toutefois, je ne me plaignais pas. Depuis les deux ans de Devon, il le prenait un week-end sur deux, m'aidant légèrement (j'insiste sur le légèrement) financièrement. Mais c'était tout. Il faisait cela par obligatoire, pas parce qu'il en avait envie. Et ça me détruisait, quand je voyais mon fils revenir avec une mine dépitée des week-ends passés avec Darren. Ça ne lui arracherait donc jamais la gueule de faire un truc parce qu'il en a envie? Je me mis à grogner toute seule, avant de mettre un steak haché en forme de Mickey dans l'assiette de Devon, lui souriant lorsqu'il me remercia. C'est fou ce que les gens peuvent faire pour vendre. Des steaks hachés en forme de Mickey. On aura tout vu! Enfin bref, ce n'était pas le moment de débattre sur le fait qu'un bordel de steak qui a même pas un goût de steak et qui ressemble à tout sauf à steak puisse avoir la forme de la tête d'une souris ou non. « Tu manges pas, Maman? » Comment dire à son gosse qu'on se sacrifiait pour qu'il puisse vivre pas trop mal sans hésiter à se serrer la ceinture un jour ou deux? Comment dire à son fils qu'on essayait de mettre un maximum d'argent de côté pour pouvoir payer le loyer le mois prochain?

Non, il n'y a pas de façons de dire ça à un gosse de six ans. « T'en fais pas pour moi, mon cœur. » C'était sûrement la meilleure chose à faire. Lui dire de ne pas s'inquiéter, que tout va aller très bien, comme toujours. Être WonderMom, c'est pas facile.




« Je reprends Devon dimanche à dix-huit heures, comme toujours? »
Darren acquiesça et, sans un mot, remonta la vitre de sa portière et la voiture parti doucement. J'étais folle d'inquiétude, et je savais que ça allait durer tout le week-end. Vendredi, dix-huit heures. C'était un week-end où Devon partait chez son père, et j'avais une boule au ventre jusqu'au dimanche, où Walker me ramenait mon fils. Mon fils, oui. J'avais toujours été incapable de dire "notre". Pendant deux, presque trois, ans il m'avait laissé seule dans cette galère. Et paf, au bout d'un laps de temps, Papa revenait! C'était simple. Il me proposait une petite somme en guise de pension alimentaire et il le prenait un week-end sur deux. Apparemment, leurs we se résumaient à un "on reste à la maison devant la télé, on parle pas, on fait pas grande chose". Mes amis n'avaient de cesse que de me dire que je devais profiter de ces deux jours pour me relaxer et m'éclater un minimum. Certains me proposaient même de me sortir, de me payer tout et n'importe quoi! Mais j'étais incapable de m'amuser sans que je sache mon fils entre de bonnes mains. Dimanche arriva trop lentement à mon goût, et, après avoir fait monter Devon dans notre petit appartement, je redescendis avant que Darren ne partent. « Tu pourrai ôter ton masque de glace une seconde? Être humain? Parce que t'es vraiment une plaie, tu sais. » Il fit un sourire narquois, avant de me répondre, sarcastique à souhait. « Être une plaie est ce que je sais le mieux faire, Monroe. » Je levai les yeux au ciel. « Non, sans déc'? T'es con, Walker. » M'exclamai-je, ma voix devenant plus aiguë au fur et à mesure que le flot de paroles quittait ma bouche. Arg. Signe de dispute. Rapidement, son sourire quitta son visage. Arg. Encore un signe. « J'ai pas envie de me disputer avec toi, Monroe. » - « Moi non plus, Walker. Mais bordel, c'est ton gosse aussi! Fais un effort, bordel de merde! » Bim. Touché, il ouvrit sa porte de voiture, sortit, la claqua. C'était partit! « J'en voulais pas, moi, j'te signale! » Douche glacée. Je démarrai au quart de tour. Première dispute depuis longtemps, bien longtemps. Une éternité. « C'est en partie ta faute si je suis tombée enceinte, assumes tes conneries, merde! C'est pas toi qui est revenu? Tu serai pas revenu, se serai pareil. et ça nous éviterai de s'engueuler en pleine rue! » Avant de réfléchir à quoi que se soit, je me mis à foutre des coups de poings -plus ou moins violents..- sur ce torse trop parfait, tout en l'insultant de connard à chaque coup porté. Il se laissa faire, une expression abasourdie sur le visage. Connard, connard, connard, connard.. Au bout d'un moment, voyant que je m'arrêtai pas, il m'attrapa les poignets, et je m'arrêtai net, mes yeux rivés vers les siens. C'était.. Étrange. Comme si l'espèce de connexion qui nous liait autrefois reprenait, comme si cet espèce de lien invisible qui nous rattachait refaisait surface. Toute ça parce que j'avais planté mes yeux dans les siens, terriblement bleus, perçants. Et le temps que je comprenne quelque chose, ses lèvres étaient plaquées sur les miennes, en un baiser fougueux, passionné. Ses bras, autour de ma taille, me soulevant de terre, accentuant l'embrassade, mes bras autour de son cou. Finalement, lorsque l'air vint à nous manquer, il me reposa à terre. Shit, shit, shit. Et je m'enfuis, pénétrai dans le petit immeuble, grimpai les escaliers quatre à quatre, manquant de ma casser la gueule une paire de fois, et claquai la porte d'entrée derrière moi.